veilles / 04 Mar 2019
Tribune - Ne comparons pas Netflix à une chaîne de télé
4 mars 2019 – par Isabelle Vignon, déléguée générale du SNPTV (Syndicat national de la publicité télévisée)
Face aux plateformes de SVOD, la télévision garde de sérieux atouts, à commencer par sa puissance, la diversité de ses programmes et une mesure d’audience exigeante.
Si les nouveaux usages en matière de consommation TV et vidéo sont connus et mieux identifiés par tous, le récepteur des chaînes et des programmes TV est lui-même devenu protéiforme. Le téléviseur trône toujours dans le salon des Français à 95%, mais il peut être remplacé selon le moment de la journée, et en fonction du contenu regardé, par l’ordinateur, la tablette ou le smartphone. Chaque jour, ce ne sont pas moins de 44 millions de téléspectateurs qui regardent la télévision quel que soit l’écran, pendant 3 heures 46 minutes.
La SVOD réunit quant à elle 4,6 millions de Français chaque jour pendant 10 minutes en moyenne, répartis sur une dizaine de plateformes, dont Netflix. S’il est vrai que sur une soirée donnée, comme par exemple le 16 janvier dernier, les SVODistes étaient 1,44 million selon le baromètre Harris Interactive/NPA Conseil, la SVOD peut difficilement être comparée à une chaîne à part entière – la cinquième ce soir-là en nombre de téléspectateurs – et ce d’autant plus que la durée d’écoute n’est pas prise en compte.
Des programmes ancrés dans l’actualité
En télévision, le pic d’audience – vers 21 heures – rassemble 24 millions de téléspectateurs, contre 6 millions pour internet à son pic, vers 18 heures. Si on comptabilisait les audiences TV au nombre de vues, comme sur les plateformes, la télévision rassemblerait chaque soir en prime time 8,6 millions de téléspectateurs pour TF1, 6 millions pour France 2 et près de 5 millions pour M6, contre à peine plus d’un million pour Netflix. D’ailleurs, selon Médiamétrie, la TV linéaire pèse pour 86% de la consommation vidéo des 4 ans et plus sur une journée moyenne, contre 10% pour les autres vidéos sur internet et seulement 4% pour la VOD et SVOD.
En revanche, ces SVODistes ont des habitudes de consommation très instructives pour les chaînes de télévision, comme par exemple l’appétence marquée des téléspectateurs pour les séries de science-fiction ou fantastiques. L’inverse s’avère plus compliqué pour les plateformes, mêmes si certaines s’intéressent de près à la télé-réalité. Elles ne pourront pas couvrir tous les aspects des programmes de divertissement que proposent les chaînes, comme les jeux, les émissions de variété… La force des chaînes de télévision va aussi bien au-delà du divertissement, avec l’information, le direct, le sport, les magazines, qui n’ont de valeur que s’ils sont ancrés dans l’actualité et consommés dans l’instant.
La colocataire préférée des Français
Si la puissance de la télévision n’est plus à démontrer, son efficacité sur les ventes est sous les projecteurs. Quel plus bel hommage à l’efficacité TV que les investissements publicitaires de Netflix et Amazon ? En un an, ils ont été multipliés respectivement par 13 et par 5. Dans l’étude de Harris Interactive que le SNPTV présentera le 25 mars, 61% des Français ont répondu « la télévision » à la question « Si on devait vous couper la TV, Facebook, YouTube ou le replay, lequel est impossible ? », loin devant les autres acteurs. Et même si les écrans mobiles sont très personnels et utilisés tout au long de la journée, la télévision aujourd’hui rassemble, connecte les familles, devient la colocataire préférée des Français.
Rappelons également que la mesure d’audience en télévision, la plus exigeante comparée aux autres médias, permettra, grâce au projet Médiamat 2020, d’obtenir une audience de référence prenant en compte tous les lieux de visionnage et tous les écrans. Enfin, la nouvelle directive européenne SMA imposera aux plateformes SVOD, dès sa mise en place, une part de 30% minimum à dédier aux contenus européens. Cette part à atteindre va obliger ces plateformes étrangères à réviser leur catalogue, sans perdre d’abonnés.