veilles / 20 Jan 2017
Publicité digitale, mauvaise impression
Le monde d’internet nous a convaincus que tout était mesurable et quantifiable. La réalité est plus que relative. Il est temps que ses acteurs s’inspirent du marché TV, qui allie qualité, fiabilité et contrôle.
Que dirait-on si TF1 ne diffusait que la moitié gauche d’un spot publicitaire? Que dirait-on si des publicités étaient diffusées en prime time sur M6 au cœur d’un contenu inapproprié? Que dirait-on si France 2 facturait une audience dont la moitié était générée par des robots? Que dirait-on si C8 mesurait elle-même les audiences de ses programmes et facturait ses clients sur cette base? Que dirait-on si BFM ne diffusait que 2 secondes sans le son d’un spot publicitaire de 20 secondes?
Auto-mesure, audience robot, visibilité réduite, contexte inapproprié… Les quatre péchés capitaux d’un monde de la publicité digitale sans règles ni mesures communes! Pourquoi accepte-t-on encore sur le digital ce qu’aucun annonceur ou agence médias n’a jamais accepté en télévision?
Reconstruire la confiance, renforcer le contrôle
Il y a toujours eu une forme de magie autour de la publicité digitale. Le monde d’internet nous a convaincus que tout était mesurable et quantifiable avec une précision absolue. Tous les acteurs du marché ont été rassurés. Enfin, il allait être possible de savoir avec certitude combien de personnes avaient réellement été exposées à un message publicitaire, avaient interagi, comment celui-ci avait déclenché une action allant de la simple adhésion à l’acte d’achat. Annonceurs, agences et médias y ont cru, et de cette croyance sont nées des certitudes.
Il est temps de réintroduire un peu de rationnel et de bon sens. L’un des principaux acteurs américains du digital vient de reconnaître par quatre fois en moins de six mois des erreurs majeures dans son système de mesure. Son principal concurrent a annoncé officiellement être utilisé par un Français sur deux chaque jour, quand la réalité est moins d’un Français sur six. La vérité devient relative: manipulation des chiffres, impressions non délivrées ou mal mesurées, publicités vidéo facturées après seulement 2 secondes de visionnage, diffusion aléatoire des campagnes et parfois dans des contextes inappropriés… Cela doit poser les bases d’une réflexion sur la nécessaire reconstruction de la confiance. Et la confiance n’exclut pas le contrôle.
Dans le marché TV, la mesure des performances des campagnes n’est pas effectuée par les acteurs qui commercialisent la publicité. On ne peut pas être juge et partie. Pour quelle raison les acteurs du digital s’affranchiraient-ils de cet axiome?
Le système de mesure mis en place pour la télévision est de qualité, transparent, reconnu de tous et régulièrement audité par le CESP (Centre d’étude des supports de publicité). La mesure est effectuée par un tiers de confiance (Médiamétrie) pour l’ensemble des acteurs du marché publicitaire et les indicateurs sont partagés entre tous: médias, régies, agences et annonceurs. Enfin, les évolutions de cette mesure s’inscrivent systématiquement dans une démarche collective.
Indicateur de mesure digital commun
A l’heure de la mise en place de la mesure quatre écrans de la télévision, demander un même niveau d’exigence sur tous les supports nous semble évident. Ainsi, la garantie de qualité, de fiabilité et de contrôle que nous offrons à nos clients TV se décline naturellement sur nos plateformes digitales: les publicités y sont diffusées dans un environnement sécurisé, en intégralité, la totalité de leur surface est visible. Dans cet esprit, les acteurs du marché travaillent ensemble à la mise en place d’un indicateur de mesure digital commun (GRP vidéo), comparable à la TV, et prenant en compte la complétion et la visibilité. Nous invitons l’ensemble des acteurs de la vidéo digitale à rejoindre cette initiative.
Le marché américain s’est réveillé récemment au travers de ses porte-parole, l’ANA (Association of National Advertisers) et l’IAB (Interactive Advertising Bureau) pour réclamer plus de transparence de la part des acteurs de la publicité en ligne. En France, le SNPTV (Syndicat national de la publicité télévisée) s’associe aujourd’hui aux initiatives du SRI (Syndicat des régies internet) et du CESP pour demander davantage de contrôle. Il est indispensable de soutenir la requête du CESP qui se propose, par exemple, d’auditer les outils de mesure de Facebook. Les prises de position de l’UDA (Union des annonceurs) et de L’Udecam (Union des entreprises de conseil et achat média) vont aussi dans le bon sens. Les annonceurs et agences ne peuvent qu’être bénéficiaires d’un contrôle renforcé des mesures.
Le manque actuel de fiabilité et de transparence porte un discrédit dans l’ensemble des marchés publicitaires. Tout cela favorise l’émergence d’acteurs qui ne se soumettent pas aux mêmes exigences qualitatives, réglementaires et fiscales. Le marché publicitaire TV a beaucoup gagné à ce que la télévision joue la carte de la qualité et de la transparence. Il est crucial qu’agences et annonceurs refusent les déviances de certains acteurs digitaux, qui mettent en péril la valeur fondamentale du secteur de la publicité: la confiance.