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L’émotion prend une place de plus en plus considérable dans nos sociétés. Omniprésente dans les médias, toujours plus recherchée par les acteurs de la distribution ou les marques de grande consommation, l’émotion semble un moyen universel pour atteindre chaque individu. Cette tendance est d’ailleurs confirmée par l’introduction des neurosciences dans le marketing et les études.

Mais de quelle émotion parle-t-on ? L’analyse des données issues de l’Observatoire des modes de vie et de consommation* révèle que si l’expression des émotions est universelle, elle advient dans des situations et des moments différents entre les hommes et les femmes, mais aussi entre les générations.

L’émotion, une expression féminine ?

On observe que les femmes sont, de façon générale, nettement plus sujettes à ces grandes émotions. De fait, elles sont beaucoup plus démonstratives de leurs émotions et notamment de leur joie (ce que confirment d’autres études : http://www.ipsos.fr/ipsos-marketing/actualites/2012-04-29-en-2012-francais-se-declarent-joyeux), alors que les hommes sont plus réservés dans l’expression de leurs affects. L’explication est en partie culturelle, notre contexte interdisant aux individus masculins les effusions marquées (associées à la sensiblerie – une valeur acceptée chez les femmes mais malvenue chez les hommes).

Plus en détail, il existe également de grandes différences hommes / femmes sur les facteurs d’émotion. Les femmes sont ainsi beaucoup plus réceptives aux expériences culturelles et artistiques : 65% des femmes ont ressenti une grande émotion lors d’un spectacle (opéra, concert), contre 55% des hommes, soit 10 points d’écart. Cette différence s’observe également pour les µuvres d’art (peinture, sculpture), mais surtout pour les livres, qui ont fortement ému 69% des femmes, contre moins d’un homme sur deux (48%). 

Autre grande caractéristique souvent présentée comme grand hiatus hommes / femmes : l’empathie féminine. On prête aux femmes une plus grande ouverture à l’autre, une capacité supérieure à être sensible à des causes qui touchent autrui. Et de fait, elles sont beaucoup plus nombreuses à se déclarer touchées par de grandes causes collectives (12 points de plus que les hommes). Finalement (ce qui, là encore, confine au stéréotype !), seules les situations sportives (victoires, grands évènements et activités extrêmes) suscitent plus d’émoi chez les hommes.

Jeunes et moins jeunes ne réagissent pas aux mêmes situations

L’âge est une autre grande ligne de démarcation dans les émotions. Non pas que les seniors soient plus émotifs que les jeunes, ni l’inverse. Mais les situations suscitant de grandes émotions diffèrent selon l’âge.

Ainsi, l’analyse des grandes émotions des jeunes confirme ce que l’on soupçonnait déjà chez la génération Y. Avides de reconnaissance et autocentrés ? Il est très net, en tout cas, que les jeunes survalorisent les succès personnels (succès professionnels, victoires sportives, examens), par rapport aux individus plus âgés. A l’inverse, ils sont moins perméables aux évènements collectifs. Les faits d’actualité, les victoires électorales suscitent beaucoup moins de réaction de leur part (14 pts de moins que chez les seniors). Les individus de la génération Y sont en revanche particulièrement sensibles aux images. Génération née devant les écrans, ils y sont plus réceptifs et sont nettement plus nombreux à avoir ressenti une grande émotion en regardant certains films, séries ou divertissements (+9 pts pour les films et pour les séries vs. les seniors).

A l’inverse, les retraités semblent beaucoup plus animés par une conscience collective. Plus libres dans l’allocation de leur temps et de leur argent, on savait qu’ils étaient plus nombreux à donner un peu de ces deux ressources pour des associations ou des causes diverses. L’étude de leurs émotions confirme ces caractéristiques : l’âge et plus particulièrement l’arrivée à la retraite correspond à une plus grande ouverture à des situations collectives ou d’engagement militant : les grandes causes, mais surtout les victoires électorales et évènements politiques touchent beaucoup plus profondément les seniors (respectivement +5 pts, +13pts et +6pts vs. les générations plus jeunes).

Reste que si l’âge ou le genre ont tendance à faire varier l’intensité de certains affects, les émotions marquantes pour les individus sont unanimement partagées et correspondent aux grands moments de la vie : décès des proches (qui a suscité une très grande émotion pour 95% des individus), naissance des enfants (94%) et mariage (83%).

Moments ou situations au cours desquels vous avez ressenti une grande émotion