Demande d'espaces gracieux

L’audience TV en jour de vision, telle que définie par Médiamétrie, n’a baissé que d’une minute en 2016, pour s’établir à 3h43 sur la cible des individus âgés de 4 ans et plus contre 3h44 en 2015 et 3h41 en 2014. Il faut néanmoins préciser que depuis le 4 janvier 2016, les résultats des chaînes comprennent les audiences des programmes visionnés en live, en différé et en catch up (replay) sur un jour donné, quelle que soit la date de diffusion initiale en live des programmes rattrapés. C’est la fameuse audience en jour de vision.

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La télévision fait de la résistance
Alors que toutes les études marketing, qualitatives et quantitatives expliquent que les jeunes désertent le petit écran, Médiamétrie nous apprend que les individus de 15 à 34 ans, regardent la télévision 2h19 en 2016 contre 2h21 en 2015, soit 2 petites minutes de moins. Les 4-14 ans la regardent 3 minutes de moins, soit 1h53 contre 1h56 en 2015. Pas de quoi s’affoler finalement, la télé fait mieux que résister. A en croire que certains consultants font commerce de la peur d’un internet omniprésent et menaçant pour les chaînes de télévision classiques 😉

Médiamétrie nous apprend même que deux cibles publicitaires ont passé plus de temps devant la télévision en 2016 : les Femmes Responsables des Achats de moins de 50 ans, nouvelle appellation des « Ménagères de moins de 50 ans » qui ont consacré 3h39 à la télévision au lieu de 3h38 et les CSP + qui ont augmenté leur temps TV de 2 minutes à 3h05.

Le fait d’agréger les audiences linéaires et délinéarisées a inévitablement eu un effet positif sur les audiences totales, même si Médiamétrie explique que les nouveaux usages vidéo ne représentent que 5% du temps total de visionnage des Français de plus de 15 ans quand le temps consacré à la télévision représente 88% du temps vidéo total. La vidéo sur internet, la VOD et la SVOD sont par ailleurs estimés à 7% du total.

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Au détour de la lecture d’une présentation récente de TF1 aux analystes, on apprend que l’apport d’audience du Replay sur le Live est de 2,2 points d’audience sur la cible des 4 ans et plus pour TF1 et de 1,7 pour les autres chaînes. Des pourcentages qui se traduisent désormais au delà du million de téléspectateurs supplémentaires pour les programmes les plus populaires. Dans son communiqué de presse de fin d’année, TF1 donne de précieuses informations sur la performance de ses programmes en Replay : « les contenus de TF1 les plus regardés en TV le sont aussi sur le digital : Le secret d’Elise (1,7 million de téléspectateurs supplémentaires en moyenne), Grey’s anatomy, Clem et Sam (1million de téléspectateurs supplémentaires en moyenne), Après moi le bonheur et Coup de foudre à Jaïpur (900.000 téléspectateurs supplémentaires en moyenne), Blindspot, Koh Lanta et La main du mal (800.000 téléspectateurs supplémentaires en moyenne) figurent dans le top du replay de l’année. Au global, 1,2 milliard de vidéos ont été consommées sur MYTF1. »

Le Replay, vrai ou faux ami des chaînes ?
Le replay, désormais indispensable pour le public, est aussi incontournable pour les chaînes de télévision. Mais il pourrait bien devenir, comme nous l’avons déjà souligné, un véritable épouvantail pour les audiences live. En effet, avec plus de 6 milliards de vidéos vues en 2016 (dont 1,2 rien que pour TF1), le replay est devenu le loisir préféré des téléspectateurs de tous les âges. Dans ces conditions on peut se poser la question de la construction des grilles de programmes qui s’efforcent de capter l’attention de plus en plus de monde à partir de 18h, au moment même où les internautes partent à la recherche de programmes à visionner en délinéarisé.

Des chaînes et des audiences
Les chaînes sont confrontées à un paradoxe : le temps TV résiste, mais les audiences live ont tendance à s’effriter. Et malgré les communiqués de presse triomphants des chaînes, la comparaison des audiences d’une année sur l’autre met en exergue les évolutions à la baisse des audiences de bon nombre d’entres elles :

  • Sur les chaînes historiques, la baisse d’audience est de 2,5 points en 2016. C’est TF1 qui enregistre la plus forte baisse avec 1 point de repli à 20,4 % de part d’audience.France 2 et Canal + sont en repli de 0,9 points tandis que Arte progresse de 0,1 point à 2,3 % pda et M6 réalise la meilleure opération de l’année en gagnant 0,3% à 10,2 % pda.
  • TF1 conserve donc son leadership en audience absolue face à ses concurrents directs mais reste sur une tendance baissière qui pourrait la faire passer sous la barre des 20% pda en 2017, année au cours de laquelle il n’y a pas de compétition de football majeure.

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  • Du côté des plus anciennes chaînes de la TNT, elles sont stables à 21,2 % de pda. C8 arrive en tête et est stable d’une année sur l’autre à 3,4 % de pda suivie par TMC qui perd 0,1 point sur l’année. Seules France 4 et BFMTV affichent une hausse de leur audience.

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  • Au final, ce sont les dernières chaînes de la TNT qui obtiennent les plus fortes progressions d’audience. HD1 et RMC Découverte arrivent à égalité à 1,8 % de pda avec une progression de 0,6 point. Numéro 23 ferme la marche avec 0,2 % pda sur l’année 2016.

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  • Cette année a également été l’année de la bataille de l’info, avec le passage de LCI en clair et le lancement de Franceinfo: . BFMTV s’en sort plutôt bien avec une audience en croissance de 0,1 point à 2,3 % pda, positionnant la chaîne du groupe Altice en tête des chaînes d’information en continu. Sans surprise iTélé voit son audience passer sous la barre du point d’audience suite à la longue grève de fin d’année. Quant à LCI elle se hisse à 0,3 % de pda suite à son passage en clair en avril dernier. Enfin, franceinfo: aurait aussi une audience comprise entre 0,3 et 0,4 % de pda selon les déclarations des dirigeants de France Télévisions.

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A la poursuite de l’idée de génie
Les dirigeants des chaînes ne sont pas dupes : ils affichent un optimisme rassurant sur leurs perspectives de croissance, mais cherchent quand même une porte de sortie pour recréer une dynamique sur leurs développements. Car il faut bien l’avouer, aucun groupe n’a vraiment réussi sa mutation numérique, principalement parce que leurs concurrents sont mondiaux et que du côté de la publicité le ciel se couvre en raison de la montée en puissance d’internet et du mobile.

Après la stratégie multi-écrans, voici venir les stratégies multi-chaînes afin de présenter au marché publicitaire des agrégats d’audiences qui permettent aux principaux groupes de chaînes privées comme TF1 ou M6 d’afficher des audiences cumulées les importantes possible, idéalement au dessus de 20 %. Gilles Pélisson, Président Directeur général du groupe, déclare dans le communiqué du groupe : « La stratégie multi-chaines déployée depuis septembre 2016 permet au groupe TF1 de proposer aux téléspectateurs une offre de chaines aux promesses différenciées et complémentaires. Au-delà du football, la chaîne TF1 a une nouvelle fois rassemblé tous les publics autour de ses grands divertissements, des JT, des grands films du dimanche soir, des séries américaines ou de la fiction française. Je suis très heureux des relances réussies de TMC et de LCI et des performances réalisées par NT1 et HD1. Concernant notre offre digitale, des dispositifs multi-écrans innovants ont été mis en œuvre pour répondre aux nouvelles attentes du public. » En moyenne sur l’année, le Groupe TF1 réalise 27.4% de pda 4+ et le groupe leader sur les Frda-50 avec 32.1% de pda.

De son côté M6 préfère se positionner vis-à-vis des nouveaux usages, en annonçant le jour de la publication des résultats annuels des audiences la création d’un studio Golden Network pour développer des productions à destination des Millennials. Nicolas de Tavernost explique au journal les Echos : « Les activités digitales génèrent actuellement environ 80 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel (hors activités e-commerce). Et nous souhaitons continuer à nous développer dans le digital, notamment en direction des jeunes. » Frédéric de Vincelles, Directeur Général des programmes de M6, précise au site Toutelatele : « M6 est la grande gagnante de l’année, à la fois à travers ses audiences, et en terme d’image. Sur la cible des femmes de moins de 50 ans responsables des achats, nous présentons la plus forte progression, toutes chaînes confondues. C’est remarquable. »

Non, la TV n’est pas morte, enfin pas encore
La télévision dispose d’atouts considérables (direct, exclusivité, grands événements, sport, programmation structurée) pour faire face au raz-de-marée de la vidéo sur internet, mais plus le temps passe et plus elle se dilue dans un océan vidéo sans limites. Et plus ces atouts deviennent insuffisants pour lutter contre les plateformes mondiales qui sont aussi capables de diffuser des événements en live, de construire des offres à la demande internationales, de créer de nouveaux concepts éditoriaux, d’innover sur les formats publicitaires et sur tout ce qui touche au traitement des données des utilisateurs : recommandation, personnalisation, ciblage. Le rêve de Reed Hastings le patron de Netflix ne va pas se réaliser tout de suite : la télévision n’est pas morte, elle ne va pas disparaître dans les 12 prochains mois. Mais elle va devoir s’adapter à un environnement concurrentiel particulièrement agressif.
Et ce ne sont pas les nouveaux écrans ultra plats présentés cette semaine au CES de Las Vegas ou les casques de réalité virtuelle qui vont inverser la courbe des audiences des chaînes et des recettes publicitaires.

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